vendredi 13 mars 2009

En France, les femmes d’origine étrangère risquent davantage de mourir à l’accouchement

Source : La Croix



Le risque de décès maternel est deux fois plus important chez les étrangères accouchant en France que chez les Françaises

La mort maternelle est toujours un drame. Devenu rare dans les pays développés, cet événement demeure le principal indicateur de la qualité et de l’accès aux soins des femmes qui accouchent.

D’après plusieurs études européennes, le taux de mortalité maternelle au sein d’un même pays diffère selon l’origine géographique des femmes. Mais la plupart de ces études se basent simplement sur les informations des certificats de décès et de naissances à l’état civil, et ne constituent pas de véritables enquêtes épidémiologiques comme celle que vient de publier l’équipe de chercheurs en santé périnatale de l’Inserm-hôpital Tenon à Paris dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire de l’Institut de veille sanitaire (InVS).

L'écart augmente en cas de complications
Selon ce travail dirigé par Catherine Deneux-Tharaux, « le risque de décès maternel est deux fois plus important pour les femmes de nationalité étrangère accouchant en France que chez les Françaises ». Dans le cas de complications de l’hypertension artérielle au cours de la grossesse ou d’infection bactérienne ou virale, il est même de quatre fois supérieur chez les femmes étrangères.

Précisons que, selon la classification internationale des maladies, on entend par « mort maternelle » le « décès d’une femme survenu au cours de la grossesse ou dans un délai de quarante-deux jours après sa terminaison (…) ». En outre, le risque de décès maternel est plus important parmi les femmes d’Afrique subsaharienne, d’Asie (Laos, Vietnam, Sri Lanka, Pakistan, Philippines) et d’Amérique (Haïti, Brésil). En revanche, il n’y a pas d’excès de risque de mortalité pour les femmes d’Afrique du Nord (Maroc, Algérie, Tunisie) ou d’Europe.

Des soins de moins bonne qualité pour les étrangères
À quoi est due cette « inégalité » entre femmes au cours de la grossesse, au moment de l’accouchement ou lors du post-partum ? Selon les chercheurs, cette différence est associée à une moindre qualité de soins prodigués, ceux-ci « étant plus souvent non optimaux chez les femmes de nationalité étrangère».

Ils évoquent des difficultés de communication et d’accès aux soins pour les femmes d’immigration récente (situation irrégulière, déclaration tardive de la grossesse), ainsi que des raisons médicales (retard au diagnostic, diagnostic non fait, traitement inadéquat, erreur thérapeutique, négligence de la patiente).

En conséquence, les chercheurs suggèrent d’« accorder une attention particulière au dépistage et à la prise en charge prénatale de l’hypertension artérielle chez les femmes d’Afrique subsaharienne (Sénégal, Mali, Niger, Tchad, Burkina, Côte d’Ivoire, Congo…) ».

La situation n'est pas meilleure dans le reste de l'UE
Le travail de l’Inserm-hôpital Tenon a été réalisé à partir de 267 décès maternels dûment identifiés par des experts (obstétriciens, anesthésistes) sur les années 1996-2001, et 13 186 témoins provenant d’une enquête prénatale de 1998.

Les résultats sont cohérents avec d’autres études européennes, quoique anciennes et moins affinées. Ainsi, aux Pays-Bas, entre 1995 et 2000, les femmes nées à l’étranger avaient un risque de décès maternel trois fois plus élevé que les femmes autochtones, tandis qu’au Royaume-Uni, en 2000-2002, le taux de mortalité maternelle des femmes noires était trois fois plus important que celui des femmes blanches.
Denis SERGENT

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