jeudi 3 février 2011

Aspects pratiques de la naissance à domicile

Source : Carrefour Naissance

Voici un texte qui peut être remis aux femmes ou aux hommes, et pourquoi pas à l'unE ou l'autre professionnelLE, qui souhaitent réfléchir à ce qu'enfanter peut vouloir dire ...
Madame, Monsieur,
Voici quelques aspects pratiques concernant le moment de la naissance de votre enfant. Je ne prétends pas tout savoir, ou avoir les meilleurs idées pour tout un chacun. Ces notes sont le résultat de mes expériences professionnelles mais aussi de ma vie privée. Ce ne sont que des informations, des propositions de réflexion, …
Ma pratique est aussi le résultat d'échanges d'idées avec d'autres parents, de recherches, d'essais ... Je vous en livre certains éléments. Je les inscris dans ce qui est devenu ma philosophie de travail : celle du respect du naturel, le mien, le vôtre, celui de nos enfants.
Ces notes ne sont pas exhaustives. Il n'est pas vraiment possible d'être complet. Certains sujets demanderaient plus de développement. N'hésitez pas à susciter une conversation à propos de l'un ou l'autre thème… Je reste à votre disposition.

Le lieu
En soi, le lieu de l'enfantement importe peu, c'est surtout l'environnement, l'ambiance… la manière avec laquelle votre conscience pourra capter et graver au fond de vous votre vécu personnel.
En soi, le lieu importe peu :  une maison, un taxi, dans un hôpital …
En soi, l'endroit importe peu : la chambre à coucher, le salon, la salle de bain…
Je me rends compte de plus en plus que lorsqu'on laisse la femme libre de faire ses choix elle peut être d'avantage à l'écoute d'elle-même, en confiance avec ses pulsions et ses désirs….  La naissance se réalise dans des endroits qui lui sont bien connus, intimes, petits, peu sonores, peu éclairés, … , parfois, dans un recoin, derrière un fauteuil ou une porte, à l'abri d'un meuble…
Il en est de même pour la position : couché, assis, accroupi… debout ? Les positions verticales sont plus "logiques".
Nous véhiculons, malheureusement, les images de certains films ou feuilletons.   Des images peu cohérentes avec la réalité, symboles de l'imaginaire d'un metteur en scène classique, galvaudant le sacré de l'enfantement, influencé par le souvenir des écrits de Balzac, ou mal conseillé par des experts qui confondent curetage utérin et naissance ou exploit (de qui ?). 
Enfanter est un processus essentiellement dynamique.
Lorsque la dilatation cervicale est (presque) complète, lorsque la femme ressent cette sensation impérieuse de devoir "pousser" ou plutôt d'accompagner le besoin impérieux de pousser, lorsque la tête de l'enfant commence à paraître, …, alors, il est encore temps de changer de position.  Et quand la tête de l'enfant est parue, aussi, il encore possible de changer de position, de marcher ...  (ce n'est pas aise, certainement, mais si la femme sent ses possibilités, il n'y a aucun danger pour l'enfant.  Cela est différent si la femme doit bouger sous l'injonction d'une tierce personne ...)
Au fur et à mesure du travail, lorsque celui-ci devient très actif, lorsque les contractions utérines ne permettent plus de "faire" autre chose que de se centrer sur elles, j'ai pu observer que les femmes prennent naturellement des positions les plus antalgiques.  "Naturellement" dans le sens où c'est, juste à ce moment-là, la position la plus économique.  Par exemple, lorsque le bébé s'engage et fait sa rotation dans la filière pelvienne, toutes les femmes prennent des positions asymétriques, légèrement penchées dans le sens de la rotation du bébé.  Cela ne peut s'observer que si personne n'intervient auprès de la femme, et si la femme n'attend/espère pas que quelqu'unE intervienne !
Dans ces conditions, la position d'accouchement la plus utilisée par les femmes européennes est "à quatre pattes".  (Il est rare qu'elles accouchent accroupies avec, comme seul appui au sol, les pieds.)  Elles partent souvent de la position à genoux, assises sur les talons ... en s'appuyant sur les mains - directement au sol ou sur un objet (chaise, accoudoir, ...) - elles se relèvent légèrement au moment de la naissance de l'enfant, en arrondissant le bas du dos.  Ce qui m'a fait penser que les enfants ne sont pas "expulsés" hors du corps de la femme, mais qu'ils participent à leur démoulage ...
Lors du déroulement naturel d'un travail et d'un accouchement - et à priori, il n'y a pas lieu de penser que cela puisse se passer autrement -, toute perturbation est susceptible d'entraîner des difficultés : c'est le cas du toucher vaginal, de propositions verbales de positions, d'attitudes ou de paroles d'encouragement, de réassurance, ... de la part de l'accompagnantE.

Accouchement à la maison ou à l'hôpital ?
Nul de peut savoir, à l'avance, où et comment se déroulera l'accouchement. 
Une difficulté peut surgir - quoique les causes de complication importante sont généralement diagnostiquées avant ou au début du travail -.  Le travail utérin peut ne pas être suffisamment efficace, le bébé peut ne pas ou mal s'engager, ... Le temps s'écoule alors, épuisant, d'heure en heure, l'énergie de la femme.  (Ce sont les seuls cas de transfert à l'hôpital que j'ai connus.) Encore faut-il se souvenir que momentanément, un travail peut ralentir, s'arrêter, reprendre par des contractions faibles, irrégulières, puis à nouveau de plus en plus efficaces, ...
C'est pourquoi, au cas où un transfert se décide, je propose de préparer à l'avance quelques affaires dans un sac (vêtements de rechange, pantoufles, quelques affaires pour le bébé, ...), vos papiers d'identité et de sécurité sociale, et votre dossier médical personnel, ... A l'avance, comme cela on écarte la petite phrase " au cas où ...", les doutes, ..., et il est alors plus facile de se laisser aller à ce qui est à vivre.

Quelques objets à prévoir pour le moment du travail et de l'accouchement à la maison :
Éventuellement, un plastique ou un linge imperméabilisé, d'environ 2 m2 pour protéger l'endroit (lit, tapis, parquet, …). 
Quelques vieux draps de lit, de vieux essuies de bain.
Des bandes hygiéniques (épaisses et très absorbantes), pour poursuivre la déambulation pendant le travail après l'éventuelle rupture de la poche des eaux, et pour après l'accouchement pour récolter les lochies (pertes de sang) pendant quelques jours.
Éventuellement une piscine gonflable, ou tout autre grand récipient permettant à la femme de s'immerger et éventuellement d'y enfanter ... (Il faudra prévoir alors un système pratique de remplissage et d'évacuation de l'eau ...)
Quelques petits sacs en plastique et un grand sac en plastique pour les déchets et les tissus imbibés.
Pour faciliter les mouvements durant le travail, et au moment de l'accouchement pour accueillir le nouveau-né : une chemise (de pyjama) avec boutons sur le devant.

Pour après l'accouchement :
Des culottes larges ou en élastique (pour contenir les bandes hygiéniques). Des petites protections de lit (alèses). Des compresses d'allaitement.
En ce qui concerne les soutiens-gorge : il est impossible de prévoir la taille qu'auront vos seins dans les jours qui suivront la naissance (la congestion des seins se produit en moyenne aux alentours du troisième jour). Contrairement à l'idée reçue, le soutien-gorge n'est pas indispensable (même pour éviter les "affaissements" et les vergetures). Je connais peu de femme qui, après un accouchement, font du jogging ou courent et sautent dans les escaliers ! Par contre, l'habitude faisant, certaines femmes ne supportent pas d'être sans soutien-gorge. Voici une proposition économique et très pratique : il existe dans le commerce (sportif) des "tops" au tissu élastique, qui soutiennent très bien les seins. Une semaine ou deux après l'accouchement, les seins prennent un volume qui restera plus ou moins stable. Il sera temps alors d'acheter un ou deux soutiens-gorge d'allaitement. (Notez que ce n'est pas la taille des seins qui indiquent l'abondance de production lactée.)

Pour le bébé :
Dans l'immédiat et durant plusieurs jours, le bébé n'a pas réellement de besoins matériels, si ce n'est votre contact.
Le bébé peut être "emballé" dans un grand essuie. L'avantage consiste dans le fait qu'on ne le manipule pas inutilement : écarter ses jambes pour mettre un lange, étirer ses bras pour passer une chemise, … Ses urines sont de petit volume. Ses selles " le méconium ", par contre, est une substance pâteuse, noire, qui peut tâcher les tissus. Il vaut mieux pour cela utiliser de vieux essuies.
Quelques jours après la naissance, des langes peuvent être utilisés (en matière synthétique ou en coton, laine, soie). Pour les langes en matière naturelle, il existe différents producteurs : il vaut mieux s'y prendre à l'avance, pour comparer les prix, et passer commande.  Il existe aussi des sites internet ou l'on peut trouver des modèles à faire soi-même  (Je peux vous les renseigner)
Le seul "vêtement", que je préconise, dès les premiers instants de vie, est le bonnet de coton ou de laine fine. Il protège la tête de l'enfant des courants d'air et d'une perte hydrique toujours néfastes les premiers jours.
Le matériel de puériculture :
Le nouveau-né peut être changé, habillé, lorsqu'on est assis, en le prenant sur les genoux, ou bien sur le divan, sur le lit, … Une table à langer, combinée avec une armoire pour ranger les vêtements, … pourra s'envisager par la suite, en fonction de l'espace dont vous disposez.
Il en est de même pour la baignoire. (A ce propos, celles vendues avec une sorte de bosse dans le fond sont peu pratiques. Elles se révèlent très rapidement trop petites.) Un récipient en plastique qui peut tenir sur la largeur de la baignoire s'avèrera très pratique. Pour être à sa hauteur, il suffira de vous mettre à genoux. Pour les premières fois, j'ai trouvé une idée originale et très simple, venant d'Allemagne : un seau. Le nouveau-né y est maintenu vertical ; les parois l'empêchent de basculer sur les côtés…  Sinon, il y a l'évier ... qui est bien pratique : après ce "temps d'eau", vous pouvez enlever le bouchon ... le bébé retrouve progressivement la sensation de son poids au fur et à mesure que l'eau s'évacue.   (Voyez aussi cette page ... http://bioethics.ws/kinous/ )
Poussette, landau et autres moyens de transport attendront bien. Durant plusieurs semaines, vous pourrez porter votre bébé dans vos bras. Soit directement, soit soutenu dans un tissu spécialement conçu pour cet effet, soit dans un tissu aménagé simplement comme le font traditionnellement les femmes d'Afrique ou d'Amérique latine. (Je peux enseigner ces pratiques de portage.)
Lit et berceau pourront aussi attendre : votre nouveau-né sera très bien dans votre lit durant les premières nuits. Il profitera ainsi de votre chaleur, de votre odeur, et de tous vos petits bruits dont il a l'habitude (S'il y a une chose dont nous sommes certains concernant le nouveau-né, c'est qu'il les connaît bien, et qu'ils lui sont très rassurants).   Si cela est valable pour votre bébé, cela l'est aussi pour vous.  Ses odeurs, ses "couinements", ses petits mouvements, son extraordinaire laisser-aller, ... auront des impacts sur vous, très en profondeur. 
Que les récents pères fassent cette expérience de garder leur bébé sur leur poitrine, en peau à peau nues, durant la nuit ...  Elle est bouleversante, incomparable, indescriptible ...
N'ayez crainte de l'écraser ou de l'étouffer : la nature est très bien faite, les émotions d'une naissance produisent (autant chez la femme que chez l'homme d'ailleurs) une sorte de vigilance transformant la structure de votre sommeil. Les phases de sommeil profond sont très très courtes et moins prononcées. Et s'il risque de prendre des habitudes, ce sont, durant ces semaines, surtout l'habitude d'être aimé et de prendre de lui-même, le moment venu, son autonomie ...
Partager le lit parental avec le bébé rend l'allaitement aussi plus aisé.
Et s'il est indispensable de lui changer un vêtement ou une couche, la surface me semble assez grande et bien pratique.
Certaines familles prolongent ce partage plusieurs mois.  Un aménagement des lieux peut alors être utile.  Il s'agit de ce que les AméricainEs appellent le "side-bed" (qui fait référence au "side-car" des motos) : on ajoute, à côté de la tête du lit, un petit matelas placé juste à la hauteur  de celui du lit parental.  (Pratiquement, il est souvent très facile d'adapter un lit à barreaux, en enlevant les barreaux d'un côté.  Ainsi, les autres côtés de cette extension présentent une protection contre les chutes.) 

Les "soins"
Je suis persuadé que le nouveau-né n'a pas besoin de soins particuliers tels qu'on les comprend dans les milieux médicaux et surtout paramédicaux. Le cordon ombilical ne nécessite pas de soin particulier : ni compresse, ni produit. Il sèche et tombe de lui-même, en moyenne le cinquième jour.
(Le courant hygiéniste a peut-être été nécessaire pour changer quelques habitudes. Il a malheureusement entraîné le développement de germes résistants à presque tout désinfectant, et perturbé considérablement nos défenses immunitaires naturelles. Sans compter que depuis lors la population est divisée en deux parties : ceux qui savent et ceux qui ne savent pas et doivent écouter les premiers !  Les techniques de soins pratiquées par les professionnelLEs ont été mises au point pour s'occuper de bébé inconnu et surtout pour atteindre un certain rendement.  Il est amusant de constater que nombreux sont les professionnelLEs qui lorsqu'ils/elles s'occupent de leurs propres enfants oublient ces fameuses techniques ...)
A votre domicile, s'il est une personne qui doit faire attention de ne pas importer chez vous trop de germes étrangers : ce sont vos invités ! C'est une des raisons pour lesquelles je touche très peu les bébés. Et c'est une des raisons pour lesquelles je ne fais pas de "soin vulvaire" (toilettage du périnée de l'accouchée) : vous prenez régulièrement une douche locale. A l'aide d'un petit miroir, vous pouvez observer votre périnée. Se toucher, se regarder ... : les éléments essentiels pour reprendre confiance - si nécessaire - en votre corps, en votre intimité ; continuer, ou retrouver, les sensations de plaisir ...
Toute personne (même "illetrée") est capable d'observer une plaie et de constater si celle-ci évolue vers une bonne cicatrisation. Toute femme est capable d'évaluer la qualité de ses écoulements vaginaux ... (si elle se touche, si elle se regarde ...).
Durant les premiers jours, le nouveau-né n'a pas vraiment besoin d'être lavé : il n'est pas sale, et transpire très peu du corps (essentiellement de la tête). Par contre le vernix (cette matière blanche et grasse qui le recouvre plus ou moins) est une protection naturelle la plus efficace qui soit. On le retrouve au niveau des plis. Là, il protège la peau des irritations de frottement. Le méconium protège aussi les fesses, c'est pourquoi, de plus en plus, je propose de ne l'essuyer que sommairement avec un linge humide ou du papier doux.
(Les lingettes vendues dans le commerce contiennent des produits chimiques dont la composition n'est pas précisée !  Par facilité, lorsque vous voyagez ou vous déplacez, vous pouvez faire vous-mêmes ces lingettes :  dans un récipient hermétique, il suffit de découper en deux un rouleaux d'essuie-tout en papier gaufré, et de le tremper avec un mélange d'eau, de savon liquide et d'huile végétale.  Vous pouvez y ajouter l'une ou l'autre huile essentielle chémotypée.)

Les matières naturelles du nouveau-né (le liquide amniotique séché, le méconium, le vernix) n'ont pas une odeur très forte et elle est loin d'être désagréable pour ses parents : elle a, par contre, un effet attirant, sur vous…  Certaines études semblent démontrer que les odeurs naturelles du nouveau-né entraînent une sécrétion de prolactine tant chez la femme que chez l'homme.  (Si la prolactine a été longtemps appelée l'hormone du maternage, aujourd'hui, il est clair qu'elle est devenue celle du parentage ...)

Ma pratique : bannir les gestes systématiques
Durant la formation médicale, l'apprentissage de gestes systématiques est indispensable pour ne rien oublier, pour acquérir une pratique, et laisser la place à la réflexion. Ensuite, il est possible de remettre en question les gestes appris, d'en mesurer l'importance et la justesse en fonction de la situation.
Le problème, en milieu hospitalier, est qu'un paramètre supplémentaire intervient : il faut penser à l'organisation de l'équipe, et au grand nombre. C'est pourquoi certains gestes sont posés systématiquement, même au préjudice de l'individu, pour palier à l'incompétence de certains membres du personnel (engagés par soucis d'économie), pour éviter les oublis si le geste est alors nécessaire, et pour ne pas mettre l'institution en péril devant les tribunaux.
Le préjudice de l'individu, quand il est mesuré, ne l'est que d'un point de vue physique.
Les justifications de ces gestes ne portent jamais sur la protection des professionnels ou de l'institution, mais des raisons souvent boiteuses sont invoquées, quand, paradoxalement, elles n'induisent pas une forme de culpabilité chez les (futurs) parents qui les mettent en question.
Le premier point, qui est à noter dans ma pratique, est que je connais les couples, la femme et son compagnon. Je les rencontre plusieurs fois, tant dans le cadre de consultations médicales (je peux ainsi observer comment se comporte la femme lors des examens, et, pour sa part, elle sait comment je les pratique - par exemple les prises de sang), que durant les séances de préparation (durant lesquelles je peux observer la dynamique du couple, et mieux connaître le compagnon, …). Généralement, les deux se combinent.
Ceci dit, ces appellations de "consultation médicale" et de "séances de préparation" sont presque ridicules, dans la mesure où il s'agit plutôt d'une rencontre et d'une découverte de personnes.  Et si l'un ou l'autre geste dit-médical devient nécessaire, celui-ci s'intègre dans la relation.


Mes deux premiers principes sont :
la nature est vraiment bien faite ;
la femme est capable d'accoucher seule.
Selon le premier principe, d'emblée, tout acte extérieur est susceptible de contrarier les mécanismes naturels, et donc d'induire des complications. (Celles-ci conduiront à réaliser d'autres actes pour tenter de les corriger : on ne sait pas où cela s'arrête !)
Mais, il est vrai : la femme peut, pour diverses raisons, avoir un comportement qui va à l'encontre de son naturel. C'est à ce niveau que les séances de préparation à la naissance vont essentiellement intervenir : l'aider à rencontrer, tout au long de sa grossesse, son naturel ; l'aider à développer en elle une confiance en ses capacités et ses compétences. Au moment de la naissance, l'essentiel de mon travail est de rappeler cette confiance, par exemple en ne me substituant pas à elle.
La confiance en soi est en chacun(e) de nous (il suffit d'observer un enfant qui apprend à marcher), mais elle a été galvaudé durant toute notre enfance et ensuite.  
Techniquement, la surveillance du travail se fait par le toucher vaginal permettant d'estimer la dilatation cervicale, la consistance des tissus, la hauteur de la présentation du bébé (étude de la progression du travail), la position de la présentation (cette recherche n'est utile qu'en cas de travail lent), et le monitoring cardio-tocographique.
En ce qui concerne le toucher vaginal, il ne faut pas perdre de vue qu'il peut être très perturbant (qu'il soit douloureux ou non) pour la femme. Physiquement et psychologiquement, l'un et l'autre étant souvent liés. Physiologiquement, un toucher vaginal "un peu insistant" peut provoquer un œdème du col utérin. Pendant l'examen, la femme doit prendre une position permettant cette exploration : elle n'est plus, alors, en connexion avec ses sensations intimes et profondes, et les retrouver après l'examen peut prendre du temps. Cet examen a aussi des répercussions psychologiques. La femme est en attente du résultat de l'examen, elle dépend du savoir d'une autre personne, ...
Le toucher vaginal réalisé durant la grossesse est un geste qui ne devrait pas être réalisé systématiquement.  La position du fœtus peut encore varier jusqu'au travail actif, la dilatation du col utérin n'est pas un bon indicateur pour prédire un accouchement prématuré.  Par contre, il aliène la femme au professionnel.
Une pratique très courante chez les obstétricienNEs, lors de la consultation lorsque la femme est (quasi) à terme, est de décoller les membranes et d'étirer le col de l'utérus.  Il s'agit d'une technique pour déclencher artificiellement le début du travail dans les 24h.  Ce geste devrait être interdit. 
La surveillance du vécu et de la santé du fœtus (par le monitoring cardio-tocographique) se font d'une manière mesurée. De nombreuses études ont démontrées que plus souvent et plus longtemps il était utilisé plus les accouchements étaient instrumentalisés. (Il y a de nombreux "faux-négatifs", jamais de "faux-positifs". Cela signifie qu'un tracé "anormal" ne signe pas nécessairement un problème, mais que s'il est "normal", alors tout va bien.) Il est reconnu que le juste milieu est d'utiliser le monitoring environ toutes les heures durant trois contractions utérines, pendant le travail actif.
Placer des ceintures pour maintenir les capteurs est très symbolique : elles soumettent la femme et son compagnon à l'autorité/savoir du professionnelLE, l'inscrivent encore d'avantage dans le processus institutionnel, mais surtout la font directement dépendre de la technique/machinerie ...   Les sons, les chiffres, le tracé sur papier leur imposent une sélection de leurs sens "extérieurs" (audition, vue ...) qui font essentiellement appel  à l'intellect pour tenter de les décoder.  Ils obstruent nécessairement les perceptions internes, nettement plus subtiles.  Mais ces dernières ne sont pas accessibles aux professionnelLEs,  qui n'ont jamais appris à faire confiance dans le vécu intérieur des femmes.
Rien ne justifie, d'emblée, si elle le souhaite, d'empêcher la femme de boire ou de manger durant le travail. Bien au contraire. Un travail de parturition peut être comparé à l'effort d'un athlète !
Cette interdiction, dans les hôpitaux, vient des anesthésistes qui craignent un réflexe nauséeux, un vomissement et le passage de liquide gastrique dans les voies respiratoires.   Alors qu'ils ne doivent intervenir que dans un minimum d'accouchement sous anesthésie générale. Il est dommage que pour une toute petite minorité et dans le concept tant annoncé du moindre risque, toutes les femmes sont exposées aux risques de la déshydratation et du manque d'énergie !
Rien ne justifie de raser le périnée d'une femme qui va accoucher. Cette habitude vient du fait que les praticienNEs ont une formation de chirurgienNEs et ont donc l'habitude de travailler sur un champs opératoire nettoyé de toute pilosité. Elle vient aussi de l'épisiotomie systématique.
Rien ne justifie une épisiotomie, sauf dans de très rares situations (grande prématurité du nouveau-né, dans certain cas de présentations par le siège, accouchement instrumentalisé). (Dans certains milieux, l'épisiotomie systématique est considérée comme une mutilation génitale.)  On ne parle pas seulement de "gestes systématiques" lorsqu'ils sont réalisés dans 100% des situations, mais lorsqu'ils sont pratiqués sans réflexion et sans indication médicale précise - et avérée scientifiquement - concernant cette personne.
Rien ne justifie, d'emblée, de vider le rectum (par un lavement chimique). Sa pratique rejoint celle du rasage du périnée : pour que le champs opératoire reste propre. En fait, le lavement chimique est dangereux : irritant le rectum, il augmente son péristaltisme, mais en même temps, il peut perturber le travail de l'utérus.
Rien ne justifie, d'emblée, le placement d'une perfusion intraveineuse
Elle ne sera que l'occasion facile d'injecter des produits médicamenteux (généralement sans avertir la femme, sans l'informer des inconvénients - et souvent sans avoir vérifié si cette substance n'est pas contre-indiquée dans le cas précis de cette femme-là -).  Les erreurs de perfusion médicamenteuse ne sont pas quantifiables.
Le liquide perfusé hydrate le corps de la femme sans que ce ne soit une réponse à son besoin : sa physiologie s'en trouve perturbée (Il n'a jamais été étudié scientifiquement les effets néfastes d'une telle hydratation forcée, par exemple, sur l'incidence des hémorragies - sujet pourtant hautement anxiogène pour les professionnelLEs -, sur les équilibres proportionnels des hormones endogènes (rétraction postnatale de l'utérus, allaitement, adaptation psychologique, ...). 
Toutefois, sans un travail de fond, et sans changement important des concepts médicaux (considérant la femme essentiellement comme un récipient - une filière pelvienne - capricieux ; et l'accouchement comme un événement à haut risque permanent), imposer à une équipe de travailler sans ce filet ne peut que créer une ambiance anxiogène.  Il semblerait que le placement d'un cathéter hépariné et bouché - ce que l'on nomme une "voie d'entrée" rapide - dans le bras de la femme soit un bon consensus.
Lorsqu'on laisse la femme se déplacer à sa guise, il n'est jamais nécessaire de lui sonder la vessie.
La rupture artificielle de la poche des eaux est un acte, qui sans justification médicale précise (hypertension intra-utérine par exemple, qui est rarissime), est agressif tant pour le fœtus que pour l'utérus (sans compter le vécu de la femme qui peut mal interpréter psychiquement le geste).
Dans le processus naturel d'un accouchement, aucune substance relaxante ou autre n'est nécessaire, sauf indication précise et impérieuse (myotonique utérin, par exemple).

Mon troisième principe est :
laisser le temps au temps.
Rien ne justifie de faire pousser activement et fortement une parturiente, de même que la poussée sur le ventre par un tiers, même lorsque la tête fœtale est à la vulve, tant que le rythme cardiaque fœtal n'est pas significativement perturbé.
Rien ne justifie, d'emblée, de réaliser une épisiotomie, ou tout autre pratique consistant à étirer artificiellement les tissus vulvaires.
Rien ne justifie de suturer les éraillures. Je mets toujours en balance la nécessité de suturer les petites déchirures avec l'inconfort et la perturbation de la relation précoce mère-nouveau-né que cet acte peut induire.
La manière avec laquelle un périnée déchiré ou coupé est suturé est fort discutable.  Il ne s'agit pas d'une plaie chirurgicale habituelle.  Le périnée est un milieu très particulier car il est en permanence humide dû aux sécrétions et aux lochies, ainsi qu'aux populations de germes en équilibre naturel.  Quelques points suffisent pour simplement rapprocher les bords des plaies qui ne seraient pas naturellement en contact.  Le moment de cette suture peut aussi être discuté avec la femme.  Il n'est pas indispensable de la réaliser directement (le seul éventuel argument pour la réaliser directement est l'anesthésie physiologie locale suite à l'accouchement.  Mais la plupart du temps elle réclame quand même l'utilisation d'un anesthésiant - en spray ou en injection -.) 

 
Le quatrième principe :
l'équilibre physiologique du nouveau-né est fragile.
Dès lors qu'on pose un acte sur le nouveau-né, nous perturbons cet équilibre. Les seuls gestes qui pourraient se justifier sont ceux qui empêchent, ou qui tendent à rétablir, un déséquilibre.
La palpation du cordon ombilical permet de percevoir les flux sanguins : rien ne justifie, d'emblée, la coupure précipitée du cordon. Si une prise de sang du nouveau-né doit se réaliser, elle peut se faire à l'aide d'une aiguille et d'une seringue dans le cordon (ou mieux dans les veines du placenta après la délivrance).
N'importe qui peut couper ce cordon.  Demander au père de réaliser ce geste est une mode et non pas un rituel.  La simple demande au père de l'enfant le place "en obligation" qui peut être très perturbant pour lui et pour sa relation à l'enfant.
Certains couples décident de ne pas couper le cordon.  On parle alors de "naissance lotus".

L'observation est un moyen très efficace pour éliminer de toute pratique l'aspiration et l'insufflation gastrique ainsi que l'aspiration bronchique. Elle ne devrait se pratiquer qu'en cas de liquide amniotique méconial ancien.
De même que la pose d'un thermomètre pour estimer la perméabilité anale, et mesurer la température du nouveau-né (le fait de le laisser couvert d'un linge chaud contre la mère est suffisant).
En écartant le nouveau-né de sa mère on perturbe aussitôt le nouvel équilibre, indispensable, mère-nouveau-né. (Si l'on considère que l(a ré)animation d'un nouveau-né se fait de manière progressive, les premiers gestes, souvent suffisants, peuvent se réaliser auprès de la mère.)
La ligature du cordon peut se réaliser auprès de la mère. Si le cordon ombilical a été coupé longtemps après l'arrêt de son battement, il n'est même pas nécessaire de le ligaturer ; les quelques gouttes de sang qui s'écoule est celui qui était prisonnier dans la veine.  Le cordon peut être coupé dans un premier temps à grande distance du ventre du bébé.  Ainsi, l'extrémité sectionnée du cordon peut être placée en dehors des linges qui recouvrent le bébé.   Il peut être raccourcit, si nécessaire, le lendemain.
L'apport d'un supplément de vitamine K peut se faire durant les heures qui suivent la naissance, sous forme buvable ; c'est-à-dire après la première tétée. Pour autant que l'adjonction de cette vitamine soit nécessaire ! (c'est-à-dire lorsqu'il y a un réel risque d'hémorragie cérébrale : prématurité, accouchement instrumentalisé, expulsion très longue, présence d'une bosse séro-sanguine.)


En guise de conclusions
Discuter ensemble de chaque geste qui pourrait être potentiellement posé présente l'avantage de savoir chacun et chacune où nous allons, et qui nous sommes. La femme, l'homme et l'accompagnantE partagent des responsabilités, non pas dans la confiance aveugle, mais dans la concertation.
La notion de responsabilité est une bouteille à encre ...  Il s'agit d'un sujet important dans le cadre d'un accompagnement de naissance.  N'est-ce pas une des vôtres que de susciter une réflexion et des discussions à ce propos ; et n'est-ce pas une de celle des professionnelLEs que vous rencontrer d'y réfléchir et d'en discuter avec vous ?

En Belgique francophone, l'accouchement à domicile est très controversé … par des personnes n'y connaissant rien (ou alors dans un cadre urgentiste - ce qui revient à comparer un restaurant trois étoiles avec un fast-food ! -), ou qui n'ont pas intérêt (!) à ce que cette pratique se développe. 
Vos proches n'ont pas fait le même parcourt que vous. Leur sollicitude à votre égard et à celui du bébé à naître est évident. Mais vous pourriez interpréter leurs remarques de manière fort culpabilisante ou agaçante. L'isolement ressenti par les couples, qui s'orientent vers plus d'autonomie et vers l'accouchement à domicile, est fréquent. C'est pourquoi je viens avec beaucoup de plaisir aux rencontres qu'organisent les familles avec des amiEs, des voisinEs ...  

Voilà. Votre bébé est là.
Durant les quelques premiers jours qui suivent la naissance, de nombreuses femmes ressentent une énergie considérable. Serait-ce un héritage du temps où elles devaient fuir le lieu de la naissance pour protéger leur bébé des prédateurs ? C'est peut-être le seul aspect naturel vis-à-vis duquel je vais vous proposer une réflexion plus approfondie, car elle est importante pour l'accueil de votre bébé.
Si on peut supposer que votre bébé vous connaît bien - il a partagé votre intimité durant plusieurs mois -, par contre vous avez tout à découvrir de lui.
Pour différentes raisons, je vous propose de vous mettre au rythme de votre bébé. D'abord, à son rythme éveil-sommeil. Il se manifestera aussi la nuit. Pensez donc à vous reposer la journée, lorsque lui dort. Ensuite, à ce moment-là, les tétées peuvent être de courtes durées. Vos seins ne sont pas encore congestionnés, c'est-à-dire plus gros, plus lourds, douloureux peut-être, ... C'est peut-être le moment de découvrir les positions d'allaitement qu'il préfère, et dans lesquels vous vous sentez les plus à l'aise : assise, semi-assise, couchée d'un côté ou de l'autre, ... Et cela, aussi, en fonction des douleurs que vous ressentez encore au niveau de l'utérus.
Quand il dort, prenez déjà du temps pour vous, pour vous doucher, pour vous faire masser, câliner, ...
Limitez les visites...
Vous, la mère comme le père, avez en vous tous les gestes naturels, nécessaires et suffisants pour votre bébé. Ces gestes vous sont propres. Si vous avez (eu) d'autres bébés, vos gestes d'aujourd'hui sont différents : ils correspondent à ce bébé-là et à ce que vous êtes aujourd'hui.
Prenez le temps de graver en vous ces moments présents ...
Jean-Claude Verduyckt,
père et sage-femme
28-4-2000

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