Source : Parents Autrement
Frapper un enfant est souvent considéré comme une méthode normale d’éducation. Voici dix raisons de ne pas le faire.
Au cours des dernières années, de nombreux psychiatres, chercheurs en
sociologie et parents ont demandé que l’on réfléchisse sérieusement à
interdire les châtiments corporels aux enfants. Selon le Docteur Peter
Newell, coordinateur de l’association EPOCH [1]
(End Punishment of Children, ou Mettez un terme aux punitions des
enfants), la raison la plus importante pour cette interdiction est que
« tous les êtres humains ont le droit à ce que l’on protège leur
intégrité physique, et les enfants sont aussi des êtres humains » [2].
1. Frapper les enfants
leur apprend à frapper. De nombreuses études sont désormais disponibles
et étayent la théorie selon laquelle on trouve une corrélation directe
entre les châtiments corporels dans l’enfance et un comportement
agressif ou violent en tant qu’adolescent ou adulte. Il n’est pas un
seul dangereux criminel qui n’ait été régulièrement menacé et frappé en
tant qu’enfant. La nature a prévu que les enfants apprennent attitudes
et comportements par le biais de l’observation et de l’imitation des
actions de leurs parents, pour le meilleur ou pour le pire. Il est donc
de la responsabilité des parents d’être un exemple d’empathie et de
sagesse.
2. Dans bien des cas de ce
que l’on appelle un « mauvais comportement », l’enfant ne fait que
répondre de la seule manière qu’il connaisse, selon son âge et son
expérience, pour signaler que ses besoins de base ne sont pas assouvis.
Parmi ses besoins, on trouve : un sommeil et une nourriture appropriés,
le traitement d’allergies parfois cachées, de l’air frais, de l’exercice
et assez de liberté pour pouvoir explorer le monde autour de lui. Dans
notre société toujours si pressée, peu d’enfants reçoivent assez de
temps et d’attention de la part de leurs parents, qui sont souvent trop
distraits par leurs propres problèmes pour traiter leurs enfants avec
patience et empathie. Il est sûrement mauvais et injuste de punir un
enfant parce qu’il répond d’une manière naturelle à la sensation d’un
besoin important qui est négligé. Pour cette raison, la punition n’est
pas seulement inefficace à long terme, elle est également injuste.
3. Le châtiment empêche
l’enfant d’apprendre à résoudre un conflit d’une manière efficace et
sensible. Comme l’éducateur John Holt l’a écrit : « Lorsque nous
effrayons un enfant, nous l’empêchons tout net d’apprendre ». Un enfant
frappé est concentré sur son sentiment de colère et ses fantasmes de
revanche. Il est ainsi privé de l’opportunité d’apprendre des méthodes
plus efficaces pour résoudre le problème auquel il fait face. Ainsi, un
enfant frappé apprend très peu de la manière dont il doit, à l’avenir,
réagir face à des situations similaires, ou comment éviter ces
situations.
4. Le proverbe « Qui aime
bien châtie bien », bien que souvent cité, vient en fait d’une mauvaise
interprétation de l’enseignement de la Bible. Bien que le châtiment soit
mentionné plusieurs fois dans la Bible, ce n’est que dans le Livre des
Proverbes que ce mot est utilisé concernant le parentage. Le Livre des
Proverbes est attribué à Salomon, un homme extrêmement cruel, dont les
méthodes très dures de discipline ont fait que son fils, Rehoboam, est
devenu un dictateur tyrannique et oppressif, qui a échappé de peu à la
mort par lapidation à cause de sa cruauté. Dans le Bible, on ne trouve
rien qui étaye une discipline dure en dehors des Proverbes de Salomon.
En revanche, les Evangiles, les plus importants des livres pour les
Chrétiens, contiennent l’enseignement de Jésus, qui incite à la pitié,
au pardon, à l’humilité et à la non-violence. Jésus voyait les enfants
comme étant proches de Dieu et a exhorté à l’amour, et non pas au
châtiment. [3]
5. Les châtiments
interfèrent avec le lien noué entre le parent et l’enfant, car il n’est
pas dans la nature humaine de se sentir plein d’amour envers quelqu’un
qui nous fait du mal. Le véritable esprit de coopération, auquel chaque
parent aspire, ne peut se développer qu’à travers un lien très fort,
basé sur des sentiments mutuels d’amour et de respect. Le châtiment,
même lorsqu’il semble fonctionner, ne peut produire qu’un comportement
bon en apparence, car celui-ci est basé sur la peur, ce qui ne peut
arriver que lorsque l’enfant est assez âgé pour résister. Par contre, la
coopération basée sur le respect sera instaurée pour de bon, et sera à
l’origine de nombreuses années d’un bonheur mutuel tandis que l’enfant
et son parent vivront ensemble.
6. De nombreux parents
n’ont jamais appris, au cours de leur propre enfance, qu’il existe des
manières positives de nouer une relation avec les enfants. Lorsque le
châtiment ne permet pas d’obtenir les buts poursuivis, si le parent ne
connaît pas de méthodes alternatives, il y a un risque d’escalade vers
des châtiments de plus en plus fréquents et des actions dangereuses à
l’encontre de l’enfant.
7. La colère et la
frustration, lorsqu’elles ne peuvent être exprimées sans risque par un
enfant, restent en lui ; les adolescents en colère ne surgissent pas de
nulle part. La colère qui s’est accumulée pendant des années peut causer
un choc aux parents dont l’enfant se sent à présent assez fort pour
exprimer sa rage. Le châtiment peut permettre d’obtenir un « bon
comportement » les premières années, mais ce sera toujours au prix fort,
payé par les parents et par la société tout entière, lorsque l’enfant
atteindra l’adolescence, puis l’âge adulte.
8. La fessée sur les
fesses, zone érogène pour l’enfant, peut créer dans l’esprit de celui-ci
une association entre la douleur et le plaisir sexuel, et lui créer des
difficultés à l’âge adulte. Les petites annonces « recherche fessée »
dans les magazines spécialisés attestent des tristes conséquences de
cette confusion entre douleur et plaisir. Si un enfant reçoit peu
d’attention de la part de ses parents, sauf lorsqu’il est frappé, il
risque de confondre davantage encore les concepts de douleur et de
plaisir. Cet enfant aura peu de confiance en lui et croira qu’il ne
mérite pas mieux. Pour en savoir plus à ce sujet, vous pouvez lire Les Dangers sexuels de la fessée.
Même une fessée relativement modérée peut être
physiquement dangereuse. Les coups infligés sur l’extrémité inférieure
de la colonne vertébrale envoient des ondes de choc le long de la
colonne, et peuvent blesser l’enfant. La prépondérance des douleurs dans
les reins chez les adultes de notre société pourrait bien trouver ses
paralysés, les fessées ayant occasionné des dégâts nerveux ; certains
sont même décédés après des coups modérés, suite à des complications
médicales qui n’ont pas été diagnostiquées.
9. Le châtiment corporel
transmet le message à la fois dangereux et injuste que « la force fait
loi », et qu’il est acceptable de frapper quelqu’un, tant qu’il est plus
petit et plus faible que soi. L’enfant conclut alors qu’il est possible
de maltraiter les enfants plus jeunes ou plus petits. Lorsqu’il
deviendra adulte, il ressentira peu de compassion pour ceux qui auront
eu moins de chance que lui, et craindra ceux qui seront plus puissants.
Cela va donc entraver la création de relations significatives qui sont
si essentielles à une vie bien remplie en termes d’émotions.
10. Parce que les enfants
apprennent à travers les modèles que représentent leurs parents, le
châtiment corporel transmet le message que frapper est une manière
appropriée d’exprimer ses sentiments et de résoudre des problèmes. Si un
enfant n’a pas l’occasion d’observer ses parents résoudre des problèmes
d’une manière créative et sensible, il peut lui être difficile
d’apprendre à le faire lui-même. Pour cette raison, il reproduira
souvent ce type de parentage incompétent sur la génération suivante.
Une éducation douce, soutenue par une forte fondation d’amour et de
respect, est la seule véritable manière d’obtenir un comportement
recommandable, basé sur de puissantes valeurs personnelles, plutôt qu’un
« bon » comportement superficiel, basé uniquement sur la peur.
Note : Une version précédente de cet article a été
publiée dans l’Annexe D du livre Abattre le mur du silence, d’Alice
Miller (Paris : Aubier Montaigne, 1992)
Références en français :
Texte original :
http://www.naturalchild.org/jan_hunt/tenreasons.html
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