dimanche 29 novembre 2009

Les violences faites aux femmes... par les médecins

Source : blog de Martin Winckler

Un article savoureux que je vous laisse découvrir en entier en suivant le lien ci-dessus.
J'en extrait cependant un passage :

"A l’occasion de la journée consacrée aux violences faites aux femmes, je publie ici un article que j’avais écrit pour "Le Livre Noir de la condition des femmes" (XO éditions, 2006) et qui avait été refusé par les directrices d’ouvrage. Il décrit les violences faites aux femmes par ceux et celles qui en principe devraient les soigner : des médecins.
[...]

Grossesse : qui est-ce qui accouche, au fait ?


Extrêmement valorisée en France par toutes les politiques nationales depuis... Vichy, la grossesse est en principe une situation physiologique, qui ne devrait pas inciter à la surmédicalisation en dehors de la surveillance bénéfique dont bénéficie toute femme enceinte. Pourtant, les témoignages sur les abus de pouvoir exercés par les médecins à cette occasion sont légion.
Sans même parler des coutumes françaises qui imposent aux femmes de rester allongées, position la moins propice à l’engagement du foetus dans le bassin au moment de l’expulsion, ou de l’impossibilité pour beaucoup de femmes de demander une anesthésie péridurale lorsqu’elle est possible ou de la refuser quand elles n’en veulent pas, la mainmise des obstétriciens - sur l’accouchement évoque des pratiques remontant au XIXe siècle.
La France est un des pays développés où l’on pratique, sans autre justification que le bon vouloir ou le confort des médecins, le plus d’accouchements provoqués, de césariennes et d’épisiotomies systématiques. Or, tous ces gestes s’accompagnent d’une morbidité importante et ne devraient donc pas être pratiqués sans justification, et encore moins sans le consentement de la première intéressée. Il s’en faut cependant de beaucoup que les femmes aient leur mot à dire à ce sujet. Considérons ainsi l’épisiotomie : cette pratique consiste à inciser la vulve au moment de l’accouchement pour « prévenir », théoriquement, la survenue d’une déchirure ( !).
Des études nombreuses ont cependant montré qu’elle ne procure pas du tout les bénéfices escomptés, et que la plupart du temps, les déchirures qui surviennent en l’absence d’épisiotomie sont superficielles et faciles à réparer. L’épisiotomie, en revanche, incise non seulement la peau, mais toute l’épaisseur du périnée c’est à dire en particulier les muscles sous-jacents. Elle entraîne par conséquent très souvent des douleurs durables, longtemps après l’accouchement, et des troubles sexuels persistants chez les femmes qui l’ont subie. Dans son rapport sur les bonnes pratiques d’accouchement, l’OMS la déconseille donc vivement et considère que les raisons médicales de l’utiliser ne dépassent pas 20 % des accouchements.
On pratique ainsi des épisiotomies dans moins de 6% des accouchements en Suède (pays dont la morbidité maternelle et néo-natale est l’une des plus faibles au monde), mais dans plus de 60 % des cas en France (et parfois 95 % pour certains centres) ! Comme tout geste médical non vital, l’épisiotomie peut parfaitement être refusée par celle à qui elle est censée « bénéficier » ; très peu d’obstétriciens cependant informent les parturientes de ce « détail » ! On oublie aussi de dire que pendant de nombreuses années, la réparation du périnée ainsi mutilé s’accompagnait d’un « point du mari », suture supplémentaire destinée à resserrer la vulve pour... assurer le confort sexuel des hommes, sans se préoccuper de ce qu’en pensent et de ce que ressentent les femmes ! D’après certains témoignages que j’ai reçus de sage-femmes en activité, cette pratique d’un autre âge a encore cours dans certains hôpitaux et cliniques français.
Malgré l’abondance des arguments scientifiques contraires à la pratique de l’épisiotomie, beaucoup de praticiens français continuent à la pratiquer sans aucune hésitation, et sans la moindre considération pour le bien-être ultérieur des personnes. On est en droit de penser qu’il en va de même dans de (trop) nombreux centres pour la césarienne et les pratiques instrumentales (forceps). Et les chiffres sont là pour le confirmer.
Indépendamment des pratiques strictement médicales, une chose est sûre en tout cas : les femmes ne sont presque jamais informées, avant l’accouchement, de la manière dont celui-ci se déroulera et des options médicales possibles pendant le travail. On ne leur demande pas leur consentement informé pour pratiquer une césarienne (il faudrait que l’information ait lieu sans même qu’une césarienne soit déjà prévue), une épisiotomie ou une manoeuvre instrumentale. Quant à l’accouchement déclenché sans raison autre que le confort de l’obstétricien, il est probablement très fréquent - mais difficile à refuser dans la mesure où les femmes peuvent craindre que leur rejet d’une procédure recommandée par le médecin entraîne un comportement moins « soignant » de sa part.
Quant à l’accouchement à domicile, presque universellement honni par la profession médicale française, il est difficile à choisir par les femmes en raison de l’insuffisance notoire du nombre de sage-femmes dans l’hexagone. Une étude américaine de 2005 montre pourtant qu’en l’absence de facteurs de risques particuliers (le plus souvent dépistés plusieurs semaines avant l’accouchement), les accouchements pratiqués à domicile par des sage-femmes expérimentées ne présentent pas plus de risques que les accouchements identiques pratiqués à l’hôpital, mais comportent un bien moins grand nombre de gestes médicaux : 2% d’épisiotomies (contre 33% à l’hôpital), 4% de césariennes (contre 19%)...
Ces résultats confortent dans l’idée que ces gestes ne sont pas liés à des complications réelles de l’accouchement, mais au déroulement de celui-ci à l’hôpital - le milieu hospitalier ayant fâcheusement tendance à faire perdre tout sens de la mesure. Cette étude est venue conforter un grand nombre d’autres études déjà faites en Suisse, en Angleterre et aux Pays-Bas. Aux Pays-Bas, 40 % des accouchements ont lieu à domicile. En France, moins de 1%. Quand on souligne cette différence, beaucoup d’obstétriciens français répondent, de manière très révélatrice... qu’ils ne sont pas assez nombreux pour ça. Or, c’est précisément le faible nombre d’obstétriciens et leur surcharge de travail qui devrait encourager les femmes sans problème (et il y en a beaucoup) qui le désirent à accoucher chez elles. Malheureusement, le plan périnatalité 2005-2007 mis en place par Philippe Douste-Blazy ne mentionne même pas l’accouchement à domicile."

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