28 octobre 2009, 12:56
Par: Steve Proulx
Accoucher normalement
Le jeudi 15 octobre, un peu avant 3600 secondes d'extase, je suis devenu deux choses: un papa et le fan numéro 1 des sages-femmes.
Depuis que Romane est née, on se pince chaque jour, ma blonde et moi, pour croire qu'on a eu la chance d'accoucher dans le confort de notre foyer.
Au Québec, c'est un luxe rare. À peine 2 % des femmes accouchent avec une sage-femme et encore moins le font à domicile.
Parce que dans l'esprit d'à peu près tout le monde en Amérique du Nord, un bébé, ça sort d'un hôpital. Et un accouchement, c'est une femme flanquée sur le dos, les jambes en l'air, le visage déformé par la douleur, qui interprète la bande-son d'un film d'horreur en écrasant les phalanges de son conjoint livide, pendant que des étrangers habillés en vert crient: "Poussez! Poussez, Madame!"
Pour traverser ce tunnel de souffrances, on a forcément besoin d'un soutien pharmacologique. D'ailleurs, ai-je appris la semaine dernière à l'émission Une pilule, une petite granule, sept femmes sur dix au Québec ont recours à l'épidurale pour contrôler leurs souffrances.
Le pire, c'est que dans notre société moderne, on en est venu à penser que ce genre d'accouchement-cauchemar est parfaitement normal. Vraiment?
Ma blonde a voulu accoucher avec une sage-femme, à la maison, dans l'eau. C'était sa décision à elle. Elle a osé quelque chose de différent. Mais parce que le monde préfère la "normalité", ma blonde et moi avons dû rassurer tous ceux qui nous aiment, qui pensaient qu'on jouait avec la vie de notre enfant en accouchant avec une sage-femme. Il aura aussi fallu trouver des réponses à toutes les angoisses, à commencer par les nôtres: "Et s'il y a des complications?"; "Et si le bébé a le cordon autour du cou?"; "Et s'il y a une hémorragie?"; "Et si ça fait trop mal?"
Bien sûr qu'il aurait pu y avoir des problèmes, mais j'ai la conviction que lorsqu'on ambitionne de donner la vie, la moindre des choses, c'est d'avoir confiance en elle, la vie.
Depuis 10 ans cette année, les nouvelles sages-femmes doivent, pour obtenir un permis de pratique, réussir une formation de quatre ans et se farcir 1740 heures de stage.
Seules les femmes qui ont des grossesses à bas risques peuvent avoir un suivi sage-femme. Et si un problème survient lors de l'accouchement et nécessite un transfert à l'hôpital, tout est en place pour que celui-ci se fasse rapidement et efficacement.
Grâce à toutes ces précautions, plusieurs recherches concluent que, dans le cas d'une grossesse normale, mettre bas dans son salon est aussi sécuritaire qu'accoucher dans un gros centre hospitalier à côté d'une distributrice de Purell.
C'est simplement une question de goût.
Mounia, notre sage-femme, est fine comme tout. Elle a 26 ans et sait tout ce qu'il faut savoir sur l'avant, le pendant et l'après de l'accouchement. Au fil de nos rencontres, elle, ma blonde et moi avons développé un véritable lien de confiance. Un lien d'humain à humain qui m'a réconcilié avec tous ces professionnels de la santé blasés, stressés, épuisés et pressés que j'ai croisés dans ma vie.
Elle n'a pas non plus eu besoin de quelque antidouleur que ce soit. De toute façon, l'épidurale n'existe pas dans le monde des sages-femmes. À la place, enveloppée dans un nuage d'endorphines, ma blonde s'endormait entre chacune de ses contractions. Elle était magnifique à voir.
Anecdote: chaque contraction, vous allez rire, ma blonde les prenait en disant un grand "Ouuuui!". On est loin de la trame sonore du film d'horreur. On est plus dans l'audio d'un film cochon, mettons.
Et c'est ainsi que Romane est venue au monde dans l'eau.
Après le départ de la sage-femme, on s'est endormis dans notre lit, et le lendemain, on s'est réveillés chez nous. On était une famille.
Cela fait maintenant deux semaines. Ceux qui voient Romane la trouvent étonnamment calme. Paraît que c'est normal. Les bébés qui naissent dans la sérénité seraient juste moins traumatisés par l'accouchement. La mère aussi l'est pas mal moins.
Pour moi, aujourd'hui, c'est ça, un accouchement normal. Et j'en souhaite un à tout le monde.
Merci à Mounia, et à toutes les autres sages-femmes du Québec, pour les bonheurs qu'elles mettent au monde...
Depuis que Romane est née, on se pince chaque jour, ma blonde et moi, pour croire qu'on a eu la chance d'accoucher dans le confort de notre foyer.
Au Québec, c'est un luxe rare. À peine 2 % des femmes accouchent avec une sage-femme et encore moins le font à domicile.
Parce que dans l'esprit d'à peu près tout le monde en Amérique du Nord, un bébé, ça sort d'un hôpital. Et un accouchement, c'est une femme flanquée sur le dos, les jambes en l'air, le visage déformé par la douleur, qui interprète la bande-son d'un film d'horreur en écrasant les phalanges de son conjoint livide, pendant que des étrangers habillés en vert crient: "Poussez! Poussez, Madame!"
Pour traverser ce tunnel de souffrances, on a forcément besoin d'un soutien pharmacologique. D'ailleurs, ai-je appris la semaine dernière à l'émission Une pilule, une petite granule, sept femmes sur dix au Québec ont recours à l'épidurale pour contrôler leurs souffrances.
Le pire, c'est que dans notre société moderne, on en est venu à penser que ce genre d'accouchement-cauchemar est parfaitement normal. Vraiment?
Ma blonde a voulu accoucher avec une sage-femme, à la maison, dans l'eau. C'était sa décision à elle. Elle a osé quelque chose de différent. Mais parce que le monde préfère la "normalité", ma blonde et moi avons dû rassurer tous ceux qui nous aiment, qui pensaient qu'on jouait avec la vie de notre enfant en accouchant avec une sage-femme. Il aura aussi fallu trouver des réponses à toutes les angoisses, à commencer par les nôtres: "Et s'il y a des complications?"; "Et si le bébé a le cordon autour du cou?"; "Et s'il y a une hémorragie?"; "Et si ça fait trop mal?"
Bien sûr qu'il aurait pu y avoir des problèmes, mais j'ai la conviction que lorsqu'on ambitionne de donner la vie, la moindre des choses, c'est d'avoir confiance en elle, la vie.
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Une sage-femme, ce n'est pas une bonne femme qui débarque avec plein de bonne volonté et des compresses d'eau chaude.Depuis 10 ans cette année, les nouvelles sages-femmes doivent, pour obtenir un permis de pratique, réussir une formation de quatre ans et se farcir 1740 heures de stage.
Seules les femmes qui ont des grossesses à bas risques peuvent avoir un suivi sage-femme. Et si un problème survient lors de l'accouchement et nécessite un transfert à l'hôpital, tout est en place pour que celui-ci se fasse rapidement et efficacement.
Grâce à toutes ces précautions, plusieurs recherches concluent que, dans le cas d'une grossesse normale, mettre bas dans son salon est aussi sécuritaire qu'accoucher dans un gros centre hospitalier à côté d'une distributrice de Purell.
C'est simplement une question de goût.
Mounia, notre sage-femme, est fine comme tout. Elle a 26 ans et sait tout ce qu'il faut savoir sur l'avant, le pendant et l'après de l'accouchement. Au fil de nos rencontres, elle, ma blonde et moi avons développé un véritable lien de confiance. Un lien d'humain à humain qui m'a réconcilié avec tous ces professionnels de la santé blasés, stressés, épuisés et pressés que j'ai croisés dans ma vie.
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Toujours est-il que le 15 octobre, un peu avant 3600 secondes d'extase, ma blonde a accouché en direct de notre sous-sol, à quatre pattes dans une piscine gonflable. Elle n'a pas hurlé de douleur, elle n'a pas eu l'air possédée du démon et n'a réduit aucune de mes phalanges en purée.Elle n'a pas non plus eu besoin de quelque antidouleur que ce soit. De toute façon, l'épidurale n'existe pas dans le monde des sages-femmes. À la place, enveloppée dans un nuage d'endorphines, ma blonde s'endormait entre chacune de ses contractions. Elle était magnifique à voir.
Anecdote: chaque contraction, vous allez rire, ma blonde les prenait en disant un grand "Ouuuui!". On est loin de la trame sonore du film d'horreur. On est plus dans l'audio d'un film cochon, mettons.
Et c'est ainsi que Romane est venue au monde dans l'eau.
Après le départ de la sage-femme, on s'est endormis dans notre lit, et le lendemain, on s'est réveillés chez nous. On était une famille.
Cela fait maintenant deux semaines. Ceux qui voient Romane la trouvent étonnamment calme. Paraît que c'est normal. Les bébés qui naissent dans la sérénité seraient juste moins traumatisés par l'accouchement. La mère aussi l'est pas mal moins.
Pour moi, aujourd'hui, c'est ça, un accouchement normal. Et j'en souhaite un à tout le monde.
Merci à Mounia, et à toutes les autres sages-femmes du Québec, pour les bonheurs qu'elles mettent au monde...